lundi 31 mai 2010

Les rayures du Monde



 La campagne
Comme un entremet acidulé
Citron-kiwi
Les dents s'agacent
Saveur qui crisse,
Les yeux dérivent aux confins des terres saturées,
Solitaire , il chemine à contre-courant ,
La peau du Monde a de bien étranges couleurs 
En ces jours brûlés de lumière ,
Il avance .
 
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Arrêt sur image / 8 " La leçon d'Espace "


 peinture sur bois et galets  1985


 
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dimanche 30 mai 2010

La petite poulette-d'Inde




Il était une fois , au Pays où humains et  animaux 
Se comprennent ,
Une poulette prématurée , boudée par ses frères et sœurs.
Las! coups de becs et horions pleuvaient sur la pauvrette!
Elle fut sauvée par les soins attentifs 
De toute la maisonnée .
Ainsi fut-elle adoptée ,
Bichonnée,
Choyée.


Partageant la couche et le couvert
De deux gracieuses cochonnes-pépères,
Elle fit bientôt un transfert,
Persuadée d'être issue de leur sein.

Depuis lors ,
Cette petite bête se pense à poil 
Tandis que pousse sa crête,
Et les quenottes cochonnesques,
Grignottent en toute quiétude ,
A l'ombre des ailes  bienveillantes


La confusion des genres..
Est-ce grave , docteur?

Rongeurs et volatile
 Nagent en plein bonheur..


 
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samedi 29 mai 2010

Fille des Mers

Peinture sur bois et galets
Agnès Mottelet 1985
                                                                     


  Née des vagues


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vendredi 28 mai 2010

Le Veilleur de la Tour du Courbier


Que vois-tu Beau Shalimar,
Perché au bord du rempart?
Que vois tu Beau Shalimar,
Miaou!Miaou!
Foi de matou!



 

Souris grasses et lézards verts,
Quel régal ,mes doux compères!
Souris grasses et lézards verts,
Miam! Miam!
Paix à leur âme!


 

Les grenouilles j'épargnerai,
Car leur goût ne me complait! 
Les grenouilles  j'épargnerai,
Flic!flac!
Floc! dans les flaques!




Qu'entends-tu ,Beau Shalimar,
Nez au vent  , ciel de Printemps!
Qu'entends-tu Beau Shalimar ,
Tiou! Tiou!
C'est le coucou!





Pinsons ,mésanges et fauvettes,
Prenez garde au gros chat qui guette!
Pinsons ,mésanges et fauvettes !
Fffffft! Ffffff !
C'est pas la fête!



Tant pis  pour  toi, chat glouton!
Tu n'auras que du Ronron!
Tant pis pour toi, chat glouton!
Et Ouf !pour les oisillons!
__________

A chanter sur l'air de "Compagnons de la Marjolaine"

photos prises par  V Balaÿ

jeudi 27 mai 2010

Plaisir du jour ......







Bonne journée à vous tous!


 
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mercredi 26 mai 2010

La boutique des rêves / 9 --- FIN



 Armand Robert jubile : tout a fonctionné comme il l'espérait.... 
Il savoure sa réussite en sirotant un vieux cognac . Dans le livre dont il caresse les pages , ce conte, tout droit sorti des pensées de Théodora Zayakis est imprimé sous ses yeux , une merveille de poésie !
Il se doutait  que cet échange littéraire  fantastique serait possible avec elle, et son intuition ne l'avait donc pas trompé.. Théodora a des talents de conteuse psychique des plus développés!
Il se dirige vers la fenêtre et contemple la petite place bordée de vieux immeubles , dominée par la cathédrale.
La lune éclaire d'une lumière ouatée ce décor immuable qu'il aime admirer en toutes saisons.
Il referme doucement le livre .Demain , il téléphonera à Théodora .


 Le soleil a filtré à travers la tenture , et la fenêtre entrouverte laisse entrer des chants d'oiseaux ..
Théodora , à peine éveillée , se lève d'un bond et s'empare du livre posé sur sa table de chevet ;
Fébrilement , elle feuillette les pages : Non , elle n'a pas rêvé , le texte est toujours là , noir sur blanc..
Ce qui la surprend  le plus , c'est de voir ,couchée sur le papier ,non pas l'histoire à laquelle elle a donné vie cette nuit ., mais celle imaginée par Armand .. c'est donc une sorte de transmission de pensée croisée.. 
Elle caresse légèrement le portrait de cet ami que finalement , elle connait bien mal ,  mais elle ne demande qu'à...
" On est en plein délire! " se dit-elle en ouvrant en grand la porte d'entrée pour respirer les parfums du jardin.
Elle avance , pieds nus sur l'herbe encore humide de rosée .
Avec le temps , elle a appris à accepter tous les remous de l'existence avec bonheur et curiosité  : cette fois , elle a de quoi faire , et pour longtemps!!
Écrire ainsi , sans effort ,  composer comme dans un rêve .. quelle aubaine !!
Et recevoir en échange , chaque soir - car elle est persuadée que cette aventure se prolongera jusqu'aux dernières pages du livre et  peut-être plus loin - un nouveau récit , insolite , troublant ..palpitant ...excitant ..La lectrice amoureuse d'intrigues inédites en frémit de plaisir anticipé..
Et pourquoi pas imaginer plusieurs recueils, toute une collection! Un incroyable duo littéraire ! Les surréalistes et leur écriture automatique sont battus à plates coutures!
Elle éclate d'un rire tonitruant qui fait s'envoler un couple de tourterelles ,perchées sur les hautes branches du bouleau , et revient d'un pas léger vers la maison .
Un bon petit déjeuner , quoi de meilleur pour envisager cette future association  ... relation .. communion ..




FIN

Agnès Balaÿ-Mottelet / Croukougnouche
texte et illustrations
26 Mai 2010
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dimanche 23 mai 2010

La boutique des rêves /8



 Il est 22 heures . Avec une certaine appréhension , Théodora a pris place dans le rocking-chair près de la fenêtre . Les rideaux verts à demi tirés font écho aux branches des arbres qui  encadrent la façade.
Elle ouvre le livre et pose ses doigts sur le papier couleur crème . Elle en sent le grain sous ses phalanges , presque une légère démangeaison ..
Soudain , une sensation étrange la saisit toute entière : comme si elle rentrait brusquement en elle-même , son estomac se contracte et un léger vertige lui fait fermer les yeux .
"Laisse venir .." se dit-elle  . Alors , un flot d'images colorées  se bouscule dans sa tête , puis , tout cela devient plus stable , un film commence dirait-on , le son en stéréo , ni trop fort , ni trop faible , le juste équilibre , Les couleurs magnifiques .
Ses mains semblent faire corps avec le livre , un flux d'énergie doux et continu ,apaisant , un rêve éveillé ..
  .....   La maison au fond de la cour . Les volets gris clair . La petite fille porte une robe courte , écossaise bleue . Un serre-tête avec un petit nœud . Elle escalade en courant ,l'escalier qui monte au grenier , la rampe en fer laqué est froide sous sa main qui glisse . Le soleil qui filtre à travers l'œil de bœuf du palier fait danser la poussière . la porte est dure à pousser .
La pièce aux trésors ... elle s'assoit au milieu des cartons et des malles et ouvre un à un les tiroirs de la commode .....
Une voix , la sienne,  raconte l'histoire , elle sourit en écoutant les mots qui l'emportent très loin en arrière , et peu à peu , elle se rend compte qu'elle peut ,à son gré ,orienter le fil du récit :
Ses pensées , sa fantaisie sont maitres du scénario , elle n'a plus qu'à laisser aller les choses..

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Armand sort d'une douce torpeur : le cadran de la pendule de bronze posée sur la cheminée indique 23h 30.
Il éprouve une grande légèreté , une jubilation profonde :  s'inventer un parcours d'aventurier , cela n'arrive pas tous les jours  , et la fiction qui vient de surgir de son imagination lui parait aussi réelle et tangible que son passé d'élève médiocre  et que le tumulte qui sévit dehors pour cause de victoire d'on ne sait quelle équipe de football !
il se lève pour fermer complètement la croisée laissée entrebâillée sur la nuit douce, mais décidément , ce vacarme nuit au fil de ses pensées..
Il y a quelques instants , il était photographe globe-trotter , portraitiste itinérant . 
A Istanbul , il tenait un studio où venaient poser des personnages excentriques .
Il collectionne les regards.
Il en a des milliers , dans ses tiroirs...
Mais un seul le fait divaguer ....

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Théodora se redresse avec un sursaut .
Le livre tombe sur le tapis avec un bruit mat .
Elle s'étire longuement en se levant du fauteuil  : " Seigneur! qu'il est tard ! presque Minuit" 
Elle ramasse le livre , et , l'ouvre à l'avant dernière page : 
c'est bien le profil d'Armand , croqué avec un certain talent désinvolte ..
Soudain , ses yeux s'écarquillent de surprise : Les dix premières pages sont couvertes de lignes imprimées , 
Une histoire de photographe embarqué dans un voyage rocambolesque ., c'est ce qui lui semble , en feuilletant rapidement  , il y a même une illustration sur fond rouge ..
Quel est donc ce miraculeux stratagème !
Vraiment perplexe ,  elle va remplir son verre de vin  ,se pelotonne dans le canapé ,et se plonge dans la lecture de cette histoire .
A petites gorgées , elle déguste le récit plein d'humour et d'invraisemblances .
Un escroc plein de panache  , elle adore..
Dehors , les oiseaux se sont tus .
Seule la lampe orangée luit à travers la fenêtre .
La forêt  sommeille.

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La boutique des rêves /7



Enveloppé soigneusement dans un papier de soie , le livre semble en tous points semblable à celui découvert chez l'antiquaire . Même reliure, même format .
Théodora a les mains qui tremblent légèrement en déposant l'ouvrage mystérieux sur la table.
Il est 21 heures. Elle se sent un impérieux besoin de réconfort : pourquoi pas une légère collation? le repas de midi est loin , et le fameux thé accompagné de petits fours fut hélas! virtuel !
Un plateau est vite préparé : quelques radis du potager avec du gros sel , une tartine de pain de campagne coiffée de fromage de chèvre et rapidement passée au four , un verre ballon à demi rempli de vin d'Alsace : ne pas se laisser impressionner par cette ambiance digne d'un mauvais roman fantastique.
Tout en croquant un premier radis , elle décroche le téléphone ....
Mais la sonnerie se prolonge , sans réponse.

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Armand s'est approché du poste en entendant l'appel , mais après avoir lu sur l'écran les chiffres du numéro , s'abstient de décrocher .
Avec la nuit, la pièce principale de son appartement , qui fait également office de bureau ,a pris des allures de grotte douillette . Il redescend rapidement au rez de chaussée pour prendre SON livre .
Ce soir est pour lui  l'aboutissement de sa quête : cette femme qu'il connait , apprécie et désire sans se l'avouer  depuis sept ans , il veut enfin savoir si les insondables méandres de son esprit peuvent se mêler aux sinuosités non moins complexes du sien.
  A l'occasion d'un voyage à Vienne , l'hiver dernier ,il a fait l'acquisition , chez un relieur renommé , de deux  albums identiques , fabriqués à partir de matériaux anciens . L'artisan lui a confié que le papier utilisé, datant du 19ème siècle , provenait d'une papeterie installée autrefois dans un moulin au bord de l'Ardèche , réputée pour produire en petites quantités , des feuilles d'une qualité exceptionnelle.
L'expérience de ce soir est absolument improbable , mais , il a tellement lu de récits extraordinaires qu'il a envie  de forcer le destin  . A force de rationalité , l'être humain a perdu nombre de facultés supra-normales  qu'il possédait aux temps anciens , de cela il est persuadé .
Ses théories , jugées fumeuses par la plupart de ses connaissances , ont fait, depuis belle lurette le vide autour de lui , ce dont il s'accommode fort bien .
Mais , au fil des rencontres avec Madame Zayakis , il lui a semblé ,dans ce qu'elle pouvait lui livrer de sa vie passée , de ses goûts littéraires , qu'elle cultivait un jardin secret assez voisin du sien..
SON livre  contient  , à la fin , un portrait volontairement elliptique de la dame de ses pensées, exécuté avec un certain talent par un ami , à partir d'une photo prise lors d'un vernissage , et inséré  par le relieur .
L'AUTRE , envoyé à Théodora  possède un autre portrait , le sien , tout aussi évasif , ce qui est , somme toute , préférable , songe-t-il avec sarcasme , le bonhomme n'étant plus dans la fleur de son âge!
Émergeant de ses pensées , il  s'assoit dans une bergère , face à la fenêtre d'où il peut admirer les lumières de la ville, ainsi que la flèche de la cathédrale.
Il ouvre alors les premières pages , et pose bien à plat  ses deux mains , une sur chaque page .
Fermant les yeux , il rentre en lui-même , laissant ses souvenirs se mêler aux fantaisies de son imaginaire , sa respiration se fait plus calme tandis que les images défilent sous ses paupières .
Les mots du récit chuchotent à ses oreilles ,avec la fluidité d'un ruisseau  et sous la paume de ses mains , le livre dégage une chaleur de bon augure .

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jeudi 20 mai 2010

La boutique des rêves /6



 Le portail grince sous la poussée de la main gantée.
La nuit est complète maintenant et un petit vent frais agite les cimes des arbres et les haies buissonnantes qui bordent l'allée menant vers la maison .
C'est une ancienne exploitation horticole : subsistent encore une  serre à l'abandon , des châssis aux vitrages brisés par les grêles du temps passé. Au delà d'une pelouse sauvageonne , du potager fantôme jaillissent encore des pieds d'artichauts ,des haricots grimpants sur des rames de roseaux , un romarin géant et divers légumes à la vivacité réjouissante.  
Théodora a rencontré lors de l'achat de cette bâtisse décrépie, la propriétaire d'alors , une très vieille dame à l'œil pétillant , mains rugueuses de jardinière à la poigne vigoureuse :
" Eh bien! ma petite dame ! je vous laisse mon jardin aux merveilles , c'est trop de fatigue pour moi , désormais .. prenez- en soin ! il vous le rendra au centuple ! "
Théodora avait ri , pleine d'une joie enfantine : un jardin ? plutôt une jungle ! il lui faudrait plusieurs années pour venir à bout de cette végétation désordonnée . Mais c'était presque trop beau , tout ce domaine à explorer , tellement inespéré ,qu'elle avait à peine réfléchi à l'état alarmant de l'habitation : elle verrait bien au fur et à mesure ..
Devant la petite porte d'entrée , elle butte contre un colis posé sur la pierre du seuil .
Sans doute le facteur aura sonné , en son absence,chez son voisin Henri, qui a la clé du portail au cas où...
Henri lui a été d'un grand secours au moment de son installation , il y a déjà presque dix ans.
Henri, c'est un ours.
Mais très serviable dès qu'il avait compris que sa nouvelle voisine n'empiéterait pas sur sa tranquillité , elle -même étant venue dans ce coin perdu par amour de la forêt.
Il lui avait indiqué les meilleurs endroits , les chemins à peine tracés, les fleurs fragiles à ramasser dès l'aube.
Elle avait pu se recréer une tanière dont elle sortait  uniquement pour se promener , récolter fleurs et plantes qu'elles ne connaissait pas encore : son herbier , commencé dès l'enfance , rassemblait en plusieurs volumes des centaines d'espèces . Elle donnait quelques cours de botanique à la ville qui n'était pas si éloignée , finalement.
C'est ainsi qu'elle était entrée pour la première fois dans la boutique d'Armand Robert.
Un livre, posé dans la vitrine .
Seuls les livres lui causaient de tels frissons.
Surtout les vieux , usés , aux pages presque friables qui recélaient parfois des illustrations d'une finesse à tomber.
Et bien sur , elle tombait , à chaque fois .
Aujourd'hui, cette passion occupe la quasi totalité des murs des trois pièces principales de son logis.
Sans parler des piles d'ouvrages divers entassés le long du couloir.
De temps à autres , elle consent à céder certaines pièces de sa collection , et Armand s'occupe des négociations.
Théodora saisit le paquet et entre chez elle .Assez vivement , elle jette son manteau sur le canapé du salon .approchant une chaise de la grande table ronde , armée d'une paire de ciseaux , elle ouvre l'emballage cartonné. : A l'intérieur , au dessus : une enveloppe , une carte gris clair et ces mots :
"Chère amie , je pense que vous serez rentrée furieuse de votre gouter manqué , vous aurez bien raison !, je suis un goujat , mais vous le savez déjà! pour me faire pardonner , ce petit présent .
Une seule consigne : asseyez-vous très confortablement , dans votre fauteuil préféré , , celui près de la fenêtre aux rideaux verts , placez le livre ( car c'en est un , n'est-ce pas .. quoi d'autre pourrait vous combler...?.) sur vos genoux , ouvrez-le à 22h , pas avant , et placez vos mains sur les premières pages ..... et attendez ... fermez les yeux , je serai avec vous..."
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INTERMEDE



 Les jours trop courts
Minutes enfuies
Le récit,
Action sur pause 
Vraie vie trop dense
Pas le temps
Malgré l'envie
Les mots 
Au dedans
Dans la tête
T'inquiète
Dés que
Peux
Ecrire
Vient
La
Suite.


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mardi 18 mai 2010

La boutique des rêves /5



Théodora dans le taxi qui file.
Le crépuscule donne à la ville des couleurs orientales.
Elle ne comprend pas ce qui a motivé l'invitation d'Armand Robert . Où a-t-il bien pu dénicher ce livre , et est-ce réellement une antiquité ?
Elle le soupçonne de plus en plus d'avoir monté de toutes pièces cette histoire de vente aux enchères lyonnaise . il serait bien capable d'avoir fait confectionner ce chef -d'œuvre par un relieur de ses connaissances .. mais dans quel but ?
Celui de l'intriguer ? plutôt réussi ! 
Par contre s'il espère ainsi tisser les rets d'une séduction imparable , il se trompe , son absence subite et prolongée : quelle muflerie consternante!
Elle frémit encore de colère rentrée.
La voiture va bientôt quitter l'autoroute ;
Elle ferme les yeux, encore presque une heure de trajet jusqu'à sa maison au bord de la forêt .
Juste se laisser flotter entre deux mondes : Nuit - jour , Hier - Demain , Jamais - Peut être....

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mardi 11 mai 2010

la boutique des rêves / 4




La reliure du livre est brun foncé , du cuir épais , gravé de dorures en creux formant des entrelacs compliqués.
Théodora ferme les yeux et plonge son visage vers les pages anciennes au parfum presque sucré.
elle les ouvre ensuite pour découvrir quelques lignes, avoir un avant-goût de la lecture prochaine .
Car elle est sure maintenant de désirer faire l'acquisition de cet ouvrage , à n'importe quel prix .
Point de titre , aucune mention de l'auteur .
Elle tourne les pages , elles sont toutes blanches , sauf l'avant dernière : 
Une gravure en couleurs lui renvoie son portrait , un visage énigmatique au regard absent .
Mais c'est bien elle .
Elle referme brusquement le livre , le pose sur la console .
Elle court au miroir  et porte une main vers ses cheveux qu'elle rejette en arrière .
Sans attendre Armand qui, décidément ,lui a ménagé une fin de journée bien curieuse, elle enfile à la hâte son manteau et s'enfuit presque de la boutique d'antiquités , oubliant son écharpe sur le dossier du fauteuil.
Le carillon de la porte  fait sonner ses petites notes aigrelettes.
Derrière la fenêtre de son appartement, Armand , appuyé contre la tenture violine, suit des yeux la silhouette qui se presse vers le carrefour et la station de taxis.
Alors , avec un soupir satisfait, il boit une longue gorgée de thé  parfumé , et descend vers son boudoir en croquant un petit feuilleté aux raisins.
Il baisse le rideau de la porte , donne un tour de clé.
Apercevant l'étole , il la saisit à la volée et s'en drape les épaules en remontant à l'étage. 
La soirée allait être passionnante.
Il n'avait plus qu'à attendre.


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samedi 8 mai 2010

La boutique des rêves /3



Le carillon de la porte retentit joyeusement .
Armand bondit vers la visiteuse du soir :
" Théodora , chère amie!!, vous avez pu vous libérer! "
Et le sémillant antiquaire entraine vers le boudoir moelleux, sa meilleure cliente .
Celle-ci  a répondu à ces effusion par une accolade appuyée , ses lèvres esquissant un ravissant sourire : "Armand! voyons! vous savez bien que je trouve toujours un moment pour venir découvrir vos trésors !!
Cela me coûte d'ailleurs fort cher , à la longue , toutes ces folies.. !
Alors , qu'avez-vous trouvé , cette fois , qui puisse encore m'étonner?
- Patience! patience!!! installez-vous confortablement , l'eau du thé chauffe , je reviens dans un instant "
Théodora Zayakis  suit des yeux le dos nonchalant de son hôte  s'éloignant vers la porte verte d'accès à ses appartements privés . La main déjà sur la poignée , il se retourne , les yeux mi-clos  , avec un léger rire " Ah! ma foi! si  vous voulez , en m'attendant , ouvrez donc le carton posé sur la console , cela devrait vous faire patienter..! "  La porte grince légèrement , on entend ensuite son pas gravir l'escalier de bois menant à l'étage.
Théodora  se débarrasse de son manteau  , sur le perroquet .
Elle soigne sa mise lorsqu'elle vient à la "caverne" . Elle sait depuis longtemps qu'Armand a un sérieux penchant ...
 Et lui-même sait qu'elle sait .L'affaire en reste là , cela convient parfaitement à leurs deux solitudes revendiquées . Pourquoi, à leur âge réitérer de fastidieuses complications : La vraie séduction est là :
Une compréhension implicite de leur connivence ,infiniment plus excitante et sulfureuse que la crue moiteur d'une couche partagée .
Elle porte aujourd'hui une longue robe aux manches étroites , faite d'une étoffe surprenante aux tons changeants , entre  bleu et  vert sombre , une sorte de tricot de velours bouclé . Son visage pâle encadré de cheveux flous , un seul bijou posé sur la peau blanche du décolleté  , elle s'observe dans le miroir au dessus de la cheminée : les sourcils arqués , la bouche mince , les paupières lasses , les oreilles ,petites et bien ourlées : elle a connu autrefois un homme qui était fou de ses oreilles..!
Bon! passons maintenant aux choses sérieuses:
Sur la console marquetée ,  le carton silencieux .
Ses mains fébriles sortent de l'emballage un grand livre ancien . Armand ne lui a pas menti , l'objet semble d'importance. Un pincement au diaphragme l'oblige à respirer profondément.
Tenant l'ouvrage précieux contre elle , elle prend place dans l'un des fauteuils .
Armand est décidément bien long avec la préparation du thé : peut être le présage d' une assiette de délicieux petits fours de chez Crémieux , tuiles chocolat poivré et palets fondants au citron confit ...
ou bien une manœuvre délibérée de ce sacripant  : la laisser découvrir seule  l'objet des délices , qu'elle puisse toucher , caresser , humer en toute quiétude , sans regard  intrus.
L'émoi devant le mystère , la beauté, ne peut se partager.
Théodora  ouvre délicatement le livre.

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jeudi 6 mai 2010

La boutique des rêves /2



 Il habitait au dessus de son magasin.
Au retour de ses escapades , il inventoriait les merveilles , choisissait avec soin celles qu'il allait laisser en vente et les mettait en scène dans son antre .
Il sentait d'instinct les incompatibilités entre certains objets : ne jamais placer ,par exemple une pendulette sur le même guéridon que les montres à gousset .
A ses débuts , il avait commis de ces impairs!
Le fameux jour où les aiguilles s'étaient emballées , gratte seconde à qui gagne la course , la nuit était tombée avant 16 heures .
Quand il avait ramassé toute son horlogerie pour la mettre sous clé dans la grande armoire Louis Philippe , il avait crié de douleur  , les boitiers étaient  brûlants , la surchauffe!
Pour les tableaux , c'était le même cirque , il y avait des hiérarchies de bienséance à respecter :
A gauche de l'armoire , les natures mortes , paysages et scènes champêtres , à droite ,les portraits de dames "comme il faut" .
Au fond , la galerie en enfilade accueillait les messieurs en civil ou en grande tenue militaire , par ordre de rang honorifique: il avait essayé de faire au mieux , car un matin , il avait trouvé tous ces beaux gredins de guingois et même pour certains , jetés au sol.
Et puis, il y avait la petite pièce où il ne menait que les fidèles  , un boudoir tendu de velours ancien .
Deux tables fragiles aux pieds chantournés , un grand miroir au dessus d'une cheminée de marbre ocre-rouge ,une bibliothèque vitrée , et des rayonnages en chêne .
Plusieurs fauteuils ,fatigués , certes ,mais qui invitaient à la contemplation , aux conciliabules autour d'un objet rare, d'un livre vieux de deux siècles..
Quand Armand convoquait , il fallait s'attendre à vivre un moment fabuleux , hors du temps.
Or , cet après-midi là , il attend pour le thé  .
Posté dans sa boutique , il admire le soleil décliner peu à peu derrière la cathédrale .
Il sait que son invitée sera ponctuelle
 
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mercredi 5 mai 2010

La boutique des rêves /1


 huile sur panneau/ fragment " une robe couleur du temps" collection particulière.




 Armand Robert avait du nez pour  les affaires.
Il arrivait très tôt sur les marchés aux puces et les brocantes et discutait le coup avec les types encore endormis qui vidaient le coffre de leur fourgonnette dans la nuit du petit matin .
Dans la pénombre , il avait le chic de trouver le truc qui tue au milieu du fatras d'une caisse à fouillis .
Il adorait ça , les objets qui ne servent à rien.
Il avait une clientèle pour ce type de raretés, des accrocs du cendrier rose ou du livre ancien aux pages jamais coupées,jamais lues ,  pleines d'un parfum troublant de poussière confite.
De jeunes demoiselles aussi , tombaient parfois en arrêt devant les coffrets à bijoux-toc et repartaient les yeux pleins d'étoiles avec une broche escargot vert fluo au revers de leur veste.
C'était un rêveur du dimanche , Armand, mais aussi un vieux renard .
Son jardin était tellement secret , que nul n'en avait jamais vu les parterres.
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mardi 4 mai 2010

Les histoires ne sont pas toujours celles que l'on croit.


 Décor-maquette : Thomas Lis

La créature est arrivée comme ça , un après midi complètement fou.
Il fallait inventer un genre de conte , et vite , avec ça.
Elle est tombée à pic,
Avec ses gros pieds nus 
Et sa maison rafistolée bizarre,
De toutes façons ,pendant ces deux ans , c'était à mille à l'heure,
Pas le temps de dire ouf,
Alors , le cerveau avait fini par s'adapter  ,
Riper en apesanteur, faire flèches de tout bois,
Malaxer des vents coulis pour en faire des chansons,
Arpenter les sentiers détournés , retomber en enfance
Roucouler à longueur de journées, grignoter des notes et des mots
 Jouer aux héros magnifiques  avec des bouts de ficelle. 
Le cœur qui décroche ,
la trouille de ne pas être à la hauteur,
Courir après sa voix,
Mais finalement j'ai adoré ,
Je me suis trouvée pile  là où il fallait.
La musique m'avait attrapée
Sur le tard
Pas trop tard ,finalement
Pour changer de peau....
Alors,
Quand je l' ai vue , là , dans ma tête,
Je n'ai pas cherché à comprendre,
Le nom a fait le reste ,
Croukougnouche.
Elle n'est pas moi,
Je ne suis pas elle ,
Mais elle vit.

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C'était une histoire d'il y a très longtemps..


  huile sur panneau "le retour de la Croukougnouche"  / fragment .



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lundi 3 mai 2010

Par la fenêtre



 Matin gris
Mais par la fenêtre 
Le vert bruissant des abeilles
Rassemblées 
Marronnier festin sucré.
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