Dessin à chaud,
par mon fils Thomas,
Graphiste à Nîmes
"Attention au retour de crayon !"
par mon fils Thomas,
Graphiste à Nîmes
"Attention au retour de crayon !"
Et ce très émouvant témoignage
J’étais Charlie
- Marie-Hélène Chabert
- Publié le 08/01/2015.
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des lettres d'amour (ou d'insultes), discuter économie avec Bernard
Maris, adopter une chatte, découvrir le métier qu'elle exerce
actuellement à "Télérama"… Notre collaboratrice a vécu tout ça à
“Charlie Hebdo”. Elle se souvient.
Il y a tout juste une semaine, chez mes
parents, mon père ressortait une carte postale sur laquelle figurait mon
visage, croqué par le dessinateur Bernar, au milieu des visages de tous
les gens de Charlie Hebdo de l'époque (1995) : « Je suis retombé là-dessus. Tu as des nouvelles de Charlie ? »
Puis, dans le train qui me ramenait à Paris, alors que je lisais Pour en finir avec Dieu, du biologiste darwiniste Richard Dawkins, j'y relevais la mention du journal français qui avait eu le courage de publier les caricatures danoises de Mahomet.
Rétrospectivement, en ce 7 janvier…
C'est vrai que je l'ai un peu perdu de vue, Charlie, tout ce temps, vingt ans depuis mon arrivée là-bas, à la faveur d'une conférence de rédaction où j'avais demandé à être conviée, dans les locaux de la rue Abel-Hovelacque, derrière la place d'Italie, fervente lectrice du nouveau Charlie depuis 1992. Val m'avait dit ce jour-là qu'ils cherchaient quelqu'un pour faire un peu tout (secrétariat, standard, abonnements), et j'avais insisté pour avoir le poste et être des leurs, démissionnant de mon boulot d'alors. J'y suis restée jusqu'en 1997. J'ai vécu avec eux les grèves de 1995, les premières mairies FN, la mort de Mitterrand.
Charlie c'était les déjeuners de l'équipe au restaurant Chez Paul, rue de la Butte-aux-Cailles, les cafés au Réveille-Matin, avenue des Gobelins.
Charlie c'était les lettres d'insultes, et parfois d'excréments, qui arrivaient au courrier.
Charlie c'était aussi les lettres de gratitude, les lettres d'amour.
Charlie c'était le bonheur de découvrir le journal imprimé le lundi matin.
Charlie c'était Philippine, la chatte que j'avais adoptée par l'entremise de Luce Lapin, qui s'occupait de la rubrique SPA.
Charlie c'était Gérard, le vendeur à la criée de la rue Mouffetard, qui venait chercher ses paquets de journaux toutes les semaines.
Charlie c'était la conférence de rédaction du mercredi et l'affichage de tous les dessins prétendant à la couverture, puis le choix débattu, avec passion, rires, discussions autour de celles « auxquelles on avait échappé ».
Charlie c'était les discussions avec Bernard Maris sur Keynes ou Marx, car je venais de terminer des études d'économie.
Charlie c'était là que j'ai découvert le métier que j'exerce aujourd'hui, la correction ; à ce moment-là que j'ai décidé de m'y former ; là qu'on s'est montré très compréhensif pour m'accorder un congé formation, m'aidant à accomplir ce dont j'avais envie, simplement parce que j'en avais l'envie, et le droit.
Charlie c'était Gébé, Cavanna, Boujut, Pasquini, tous morts depuis, eux aussi.
Charlie c'était Luz le surdoué, le gamin, le facétieux.
Charlie c'était quand on a « sauté sur Toulon », fin 1995, prenant tous le train pour le Var pour une rencontre et la présentation d'un livre en réaction à l'élection du FN Le Chevallier à la mairie.
Charlie c'était la pétition lancée pour faire interdire le Front national.
Charlie c'était Charb, d'une intelligence exceptionnelle, une intelligence sobre, sans esbroufe, d'une droiture sans faille. Charb qui disait : « Comment peut-on être fier d'être français ? Fier d'être corse, ou breton, ou ci, ou ça ? Comment peut-on être fier de quelque chose qu'on n'a pas choisi ? »
Charlie c'était parce que j'étais fière, moi, de les avoir choisis.
Puis, dans le train qui me ramenait à Paris, alors que je lisais Pour en finir avec Dieu, du biologiste darwiniste Richard Dawkins, j'y relevais la mention du journal français qui avait eu le courage de publier les caricatures danoises de Mahomet.
Rétrospectivement, en ce 7 janvier…
C'est vrai que je l'ai un peu perdu de vue, Charlie, tout ce temps, vingt ans depuis mon arrivée là-bas, à la faveur d'une conférence de rédaction où j'avais demandé à être conviée, dans les locaux de la rue Abel-Hovelacque, derrière la place d'Italie, fervente lectrice du nouveau Charlie depuis 1992. Val m'avait dit ce jour-là qu'ils cherchaient quelqu'un pour faire un peu tout (secrétariat, standard, abonnements), et j'avais insisté pour avoir le poste et être des leurs, démissionnant de mon boulot d'alors. J'y suis restée jusqu'en 1997. J'ai vécu avec eux les grèves de 1995, les premières mairies FN, la mort de Mitterrand.
Charlie c'était les déjeuners de l'équipe au restaurant Chez Paul, rue de la Butte-aux-Cailles, les cafés au Réveille-Matin, avenue des Gobelins.
Charlie c'était les lettres d'insultes, et parfois d'excréments, qui arrivaient au courrier.
Charlie c'était aussi les lettres de gratitude, les lettres d'amour.
Charlie c'était le bonheur de découvrir le journal imprimé le lundi matin.
Charlie c'était Philippine, la chatte que j'avais adoptée par l'entremise de Luce Lapin, qui s'occupait de la rubrique SPA.
Charlie c'était Gérard, le vendeur à la criée de la rue Mouffetard, qui venait chercher ses paquets de journaux toutes les semaines.
Charlie c'était la conférence de rédaction du mercredi et l'affichage de tous les dessins prétendant à la couverture, puis le choix débattu, avec passion, rires, discussions autour de celles « auxquelles on avait échappé ».
Charlie c'était les discussions avec Bernard Maris sur Keynes ou Marx, car je venais de terminer des études d'économie.
Charlie c'était là que j'ai découvert le métier que j'exerce aujourd'hui, la correction ; à ce moment-là que j'ai décidé de m'y former ; là qu'on s'est montré très compréhensif pour m'accorder un congé formation, m'aidant à accomplir ce dont j'avais envie, simplement parce que j'en avais l'envie, et le droit.
Charlie c'était Gébé, Cavanna, Boujut, Pasquini, tous morts depuis, eux aussi.
Charlie c'était Luz le surdoué, le gamin, le facétieux.
Charlie c'était quand on a « sauté sur Toulon », fin 1995, prenant tous le train pour le Var pour une rencontre et la présentation d'un livre en réaction à l'élection du FN Le Chevallier à la mairie.
Charlie c'était la pétition lancée pour faire interdire le Front national.
Charlie c'était Charb, d'une intelligence exceptionnelle, une intelligence sobre, sans esbroufe, d'une droiture sans faille. Charb qui disait : « Comment peut-on être fier d'être français ? Fier d'être corse, ou breton, ou ci, ou ça ? Comment peut-on être fier de quelque chose qu'on n'a pas choisi ? »
Charlie c'était parce que j'étais fière, moi, de les avoir choisis.
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Et moi qui adore Cat Stevens
J'espère ...
Et moi qui adore Cat Stevens
J'espère ...
Inutile d’en rajouter, tout a été dit ou sera dit sur cette tentative d’assassinat de la République, de la démocratie et de la Liberté de pensée. Je dis bien TENTATIVE, car nous restons debout et unis plus que jamais autour des valeurs de l’Humanisme. Cependant le danger est de vouloir crier vengeance et de nous diviser. Or c’est précisément ce que cherchent ces crétins congénitaux, ils n’attendent que le moment où les musulmans seront sous une telle pression qu’ils finiront par se soulever contre ceux qui les stigmatisent. Ne laissons pas l’extrême droite récupérer ce drame. La démocratie est fragile et dans ces moments terribles, elle est d’un exercice difficile. Montrons qui nous sommes et n’ajoutons pas la haine à la haine. Finalement encore une fois, seule la Laïcité est le garant de la Démocratie…
RépondreSupprimerJe suis bien sur complètement d'accord avec toi, d'autant plus que je travaille en milieu scolaire et en ZEP où la majorité des familles sont issues de l'immigration , les enfants scolarisés , les relations sont excellentes avec les équipes enseignantes et je suis vraiment persuadée que le changement de mentalités ne peut se faire que par l'éducation , le partage des cultures dans ce qu'elles ont de meilleur , communication , dialogue et respect des différences .
Supprimerj'adore toutes les musiques du bassin méditerranéen ., lieu de brassage multiculturel ...
La plupart des personnes ne se retrouvent pas dans cette lecture violente d'un Coran détourné de son message
Mais il se trouve ici et là des guides qui véhiculent ces discours fondamentalistes , qui montent en épingle ces visions fanatiques.
et qui sont très écoutés car responsable du culte dans les mosquées locales..
Comment peut on lutter ? sur le terrain c'est relativement facile , au jour le jour , avec nos petits moyens d'humain militant , convaincu qu'en semant , il y a toujours l'espoir d'une récolte bénéfique et pacifiste..
mais tout se passe à un niveau qui nous dépasse , il est décisif que les politiques se mettent au boulot , sinon, comme tu dis ,les extrêmes vont se frotter les mains.
Le dessin de mon fils ne veut pas appeler à une quelconque vengeance , je pense que la pluie de crayons évoque plutôt une réponse artistique et poétique à ce carnage commis au nom d'un Dieu cruel et vengeur .
Merci de ton intervention car elle permet de vraiment réfléchir avec un peu plus de recul .
Ne nous laissons pas entrainer par les médias sur un terrain très sensible.
Je n'ai pas pu voir le dessin, mais j'aime bien l'idée du retour de crayon !
RépondreSupprimerOn peut choisir d'être con, mais en être fier pour autant ?
RépondreSupprimerOui, avec Cat Steven, espérons...
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