samedi 5 septembre 2009

ROMAN-PHOTO , suite :Pas de brunch pour Gianfranco....

La matinée est bien avancée... Fausta s'étire sur les draps couleur tilleul.les voilages de la grande baie vitrée bougent doucement , les rumeurs du brunch au bord des bassins de la piscine montent en un mélange de conversations feutrées , de rires , de musique discrète, de tintements de couverts : elle a très faim!!!!
Gianfranco a disparu , sans doute est il déjà descendu commander une collation légère et rafinée:
il a tellement bon goût!!!! et il est tellement matinal!!!
Elle passe dans le salon de bains et laisse longuement ruisseler l'eau fraiche sur son corps encore endormi.
elle choisit ensuite une tenue couleur terre cuite , robe portefeuille , qu'elle enfile sur une culotte de soie grise . Pas de soutien-gorge: son amant aimant deviner ses courbes un peu lourdes sous ses vêtements , il le lui a signifié dès leurs retrouvailles dans ce lieu hors du temps.
A son contact elle a perdu tous complexes et accepte cet hommage fait à sa belle maturité.
Devant l'immense miroir , elle scrute son visage hâlé par le soleil africain, lisse la masse de ses cheveux en arrière , un peu de rouge à lèvres , la chainette avec le diamant brut , elle enfile ses escarpins fauves , et referme la porte , avant de dévaler d'un pas léger le bel escalier aux dalles de marbre lisse.
A leur table attitrée , le couvert est dressé , des plateaux avec un assortiment de sushis ...
Mais toujours pas de Gianfranco........ Le maitre d'hôtel lui sourit et confirme le passage du Comte un peu plus tôt , il ne doit pas être loin..
Avec un léger soupir , elle laisse errer son regard au delà de la terrasse , puis se décide à commencer sans lui : son appétit est trop impérieux et elle adore ces mets délicats....

Il est maintenant tellement tard que la plupart de convives ont quitté les tables et sont partis en excursion, ou sommeiller sur les banquettes autour de la piscine la plus ombragée à cette heure de la journée .Fausta sent un vague malaise l'envahir , elle qui est si indépendante , elle se sent fragilisée par cette absence imprévue , qui se prolonge inexplicablement.
Elle remonte enfiler son maillot et décide de se baigner en attendant.....

Elle fait quelques exercices pour délier ses muscles , l'eau permettant une bienheureuse détente.
Sur le dos , les yeux fermés , elle se laisse bercer par le clapotis des vagues artificielles...
Mais , vraiment , les ombres s'allongeant , elle ressent maintenant une sourde inquiétude ,
Les excursionnistes du Pilanesberg, attablés avec leur guide devant des drinks aux couleurs pastel lèvent leurs verres en portant un toast , le crépuscule descend peu à peu,
DJ Martin s'est installé derrière ses platines , et bientôt , la musique épicée envahit l'espace,
Des couples se lèvent en riant et se mettent à onduler en rythme autour des bassins....

Fausta a regagné sa chambre non sans avoir demandé à la réception si le Comte della Barbosa avait laissé un message pour elle :
Frédéric Koaty, le gérant de l'hôtel s'était empressé, plutôt obséquieux : "Non , chère Madame , mais peut être est il en rendez-vous au cercle de jeu, il me semble ,ce matin ,l'avoir entendu en conversation téléphonique , lors de son petit déjeuner qu'il a pris avec le chauffeur de brousse , vous savez bien , ce Ben qui a une vieille voiture dégoutante!!! c'est vraiment un honneur que Monsieur le Comte fait à ce va-nu pied!!" et Le gérant renifla en levant les yeux au ciel.
"loin de moi l'idée de jouer à espionner nos résidents, je suis la discrétion même " insista-il en tripotant nerveusement le noeud de sa cravate ornée de très voyants crocodiles vert- fluo sur fond chocolat " mais il m'arrive d'entendre sans le vouloir , certaines choses.....
-Mais qu'avez-vous entendu??? " s'était exclamée Fausta,profondément agacée par l'attitude de Monsieur Koaty.
-Pas grand chose, à vrai dire , seulement quelques mots dont celui-ci qui est revenu plusieurs fois: "montrez-moi votre joker!!" , oui , Monsieur le comte a répété celà , et puis aussi : " la casserole est sur le feu" , c'est étrange , je ne pensais pas qu' un gentleman de sa classe pouvait faire cuire lui-même son souper...."
Frédéric Koaty se frottait pensivement le menton , et Fausta , exaspérée , avait quitté rapidement le grand hall.
Maintenant , assise au bord du lit déserté , elle laisse l' angoisse la submerger : il est arrivé un évènement imprévu , jamais Gianfranco ,de son propre chef ,ne la laisserait ainsi , sans nouvelle aucune, lui si prévenant , ayant à coeur de faire de ce bref séjour un enchantement.
Elle se reprend, retrouve son énergie , et décide d'aller passer un moment au cercle de jeu , quelqu'un saura certainement quelque chose :
son amant ne lui a pas caché son attrait pour les jeux dangereux : les cartes , les paris un peu louches , le monde flou des affaires traitées à 4h du matin derrière un verre de grappa ou de Mampower : elle sait tout celà , et elle l'accepte , celà contribue à l'attraction que cet homme venu de nulle part exerce sur elle , si sage jusqu' à cette nuit du Carnaval.....
Celà lui semble tellement loin.... Venise , Luigi , Le voilier filant sur les eaux de Mediterrannée..
Vêtue maintenant d'un magnifique fourreau émeraude agrémenté d'un pan de mousseline couleur de fumée jeté sur ses épaules , elle fait son entrée dans la salle de jeu noyée dans une demi pénombre .
hormis l'éclairage violent au dessus de chaque table, le reste de la pièce , en forme de demi-lune,
offre d'accueillantes alcôves : canapés profonds et tables basses de laque noire,le tout baigné d'une clarté bleutée , rendant propices les rencontres de travail ou autres....

Elle s'est assise non loin du bar , dans une des alcôves , le siège moelleux semble l'engloutir dans ses profondeurs ... Un serveur arrive aussitôt pour prendre sa commande de boisson : elle qui ne prise pas les alcools forts se surprend à demander une vodka-martini avec un zeste de citron jaune...
Tous ses repères ont fui , loin , si loin , elle se sent devenue étrangère à elle-même , une autre femme , perdue dans un monde inconnu mais plus forte qu'auparavant , prête à tout , et surtout, infiniment plus belle et mystérieuse , elle sent, sans les voir , tous ces regards furtifs posés sur elle , à travers cette presque-nuit , et elle frissonne de se dire qu'elle aime çà...
Le serveur revient sans bruit déposer son verre , un bol de cristal empli de glaçons sur la petite table et , également , en se penchant vers elle presque la frôler ( elle perçoit le parfum de ses cheveux luisants , une huile aux effluves de bois de cèdre) un petit plateau où repose un téléphone portable.
Fausta avec un sursaut, lui saisit le poignet et lui adresse du regard une question muette ,
Sans presque remuer les lèvres , toujours penché vers elle , il souffle :
"Dans quelques minutes ce téléphone va sonner: surtout ne dites rien , décrochez, écoutez .
Ensuite partez d'ici en le laissant sur la table , ne parlez à personne de l'hôtel , faites ce qu'ils vous dites , je vous le conseille , je ne vous ai pas vue , inutile de me recontacter"
L'élégant serveur au profil de médaille se redresse et regagne le bar.
Fausta a le coeur qui s'est mis à battre à toute allure , d'un trait elle avale son verre , et se met à tousser violemment sous la brûlure de l' alcool auquel elle n'est pas habituée .
Elle s'adosse ,épuisée, aux coussins élastiques du fauteuil et ferme les yeux.


1 commentaire:

  1. Un peu de piment... et c'est heureux. Je suis plongé dans une réflexion mystèrieuse. L'impro soudain fait un bond en avant...
    Il y a de la chair dans nos personnages. Un grand bonheur de création.

    ( hors sujet : j'ai eu des problèmes avec un mail que j'ai envoyé...à ton adresse, et à vincent; peut-être mon ordi qui déconne)

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